Asthme – Moyens d’actions sur l’environnement
1. Introduction
L’asthme, maladie respiratoire chronique, toucherait 11 % de la population française, avec une prévalence qui aurait tendance à augmenter dans les pays occidentaux depuis les années 1990. Il s’agit d’une maladie multifactorielle, qui résulte d’une prédisposition génétique et d’une exposition à un ou plusieurs facteurs favorisants.
De nombreuses études ont démontré l’impact des facteurs environnementaux sur l’asthme, dont notamment les allergènes respiratoires (pollens, acariens, moisissures, animaux de compagnie), mais également des facteurs irritants comme le tabac, la pollution (particules fines, combustion du charbon, dioxyde d’azote) et même l’exposition aux pesticides.
Malheureusement, l’éviction stricte d’un certain nombre de ces allergènes ou irritants parait impossible du fait de leur présence en suspension dans l’air extérieur. Chez les sujets à risque, quelle conduite à tenir pour réduire au maximum l’exposition ?
Voici Un résumé basé sur deux interventions lors du Congrès Français d’Allergologie du 19 au 22 avril 2022, à savoir « moyens d’actions sur l’environnement : qu’est ce qui est validé par l’éviction ?», présenté par Dr Léa RODITIS (CHU de Toulouse) et « évaluation de l’environnement intérieur : comment faire et jusqu’où aller ? » présenté par Dr Stéphanie WANIN (AP-HP).
2. Éviction des acariens
L’exposition précoce aux acariens serait corrélée au développement d’un asthme chez les enfants issus de familles atopiques et il existe une corrélation robuste entre une exposition constante et le contrôle de l’asthme. Présents dans plus de 90 % des habitats, ils dépasseraient les seuils de détection significatifs dans 35 % des habitations.
Les acariens mesurent entre 0,1 et 0,5 mm et ne sont donc pas visibles à l’œil nu. Ils se nourrissent de squames de peau et de moisissures. Le climat optimal à leur prolifération est une température autour de 25° et un taux d’humidité entre 60 et 80 %. Ils reposent sur les surfaces (idéalement dans la literie), mais peuvent être mis en suspension temporaire dans l’air (environ 15 minutes), notamment lors du passage de l’aspirateur ou lors de la réfection d’un lit.
Afin de réduire l’exposition, des mesures simples ont démontré leur efficacité, à savoir :
- L’utilisation d’housses antiacariens intégrales pour oreillers et matelas (qui enveloppent tout le matelas), imperméables aux particules inférieures à 0,1 mm. Elles se remplacent tous les 10 ans, et peuvent être prises en charge par certaines mutuelles.
- Le passage régulier de l’aspirateur avec filtre HEPA (filtre à air à haute efficacité). Il se trouve dans les magasins d’électroménager et se remplace tous les 6 mois à un an.
- Le lavage régulier de la literie à 60°C
- L’élimination des « réservoirs » : peluches, moquettes, tapis, meubles rembourrés, …
- L’aération quotidienne de la chambre à coucher
- Le maintien d’une température de la chambre à 19°C
L’utilisation de purificateurs d’air semble par ailleurs peu efficace, puis qu’ils n’éliminent que les particules en suspension dans l’air.
3. Éviction des allergènes d’animaux
Les animaux domestiques sont présents dans 30 % des foyers. Paradoxalement, étant très volatiles, les allergènes de chats et de chiens sont retrouvés dans quasiment tous les foyers et lieux publics (par contamination aéroportée) et à des taux de significativité clinique dans 40 % des cas, rendant leur éviction stricte impossible.
La mesure la plus radicale serait le retrait de l’animal dans le foyer, ce qui est difficile à mettre en pratique, bien qu’efficace.
Les mesures plus acceptables pour limiter l’exposition sont les suivantes :
- Bannir l’animal de la chambre à coucher
- Laver l’animal de façon hebdomadaire
- Aérer quotidiennement les lieux de vie
- Passer l’aspirateur régulièrement en utilisant un filtre HEPA
- L’utilisation d’un purificateur d’air peut s’avérer bénéfique
4. Éviction des pollens
Présents dans l’environnement de façon saisonnière, il existe une corrélation robuste entre leur exposition et les exacerbations asthmatiques, surtout vis-à-vis des pollens de graminées. Leur éviction stricte reste cependant impossible.
Pour mesurer les taux de pollinisation d’un grand nombre de variétés de pollens, une multitude de capteurs sont installés en France et dans le reste du monde. Les données sont collectées en France, par le Réseau National de Surveillance Aérobiologique (RNSA), qui a en partie pour objectif d’évaluer l’incidence des pollens sur le risque allergique pour la population. Ainsi, des cartographies des émissions de pollens peuvent être réalisées, permettant de suivre les pics polliniques, en temps réel, pour une région donnée.
Il existe tout de même certaines recommandations pour réduire leur exposition, à savoir :
- Suivre les calendriers de pollinisation et se confiner dans l’habitat lors des pics polliniques
- Se laver les cheveux, et changer de vêtements en rentrant d’une sortie prolongée lors des pics polliniques, surtout en pleine nature
- Éviter de sécher le linge à l’extérieur lors des pics polliniques
5. Évaluation de la pollution de l’environnement intérieur
Nous passons en moyenne plus de 50 % de notre journée dans notre logement. Nous y sommes ainsi exposés à une multitude de polluants biologiques, dont les moisissures, bactéries, acariens. Ces polluants sont parfois en interaction ou en compétition (par exemples les acariens peuvent se nourrir de moisissures, et inversement…) et leur développement peut être dépendant de facteurs environnementaux comme des produits biologiques (mycotoxines, allergènes…), le niveau d’humidité, la température, etc….
Dans la plupart des cas, les moisissures n’ont pas d’effets sur la santé, car éliminées directement par l’organisme. Parfois l’équilibre est en défaveur, ce qui peut mener au développement de pathologies infectieuses ou allergiques, comme l’asthme, les mycoses broncho-pulmonaires allergiques, ou les pneumopathies d’hypersensibilité.
Dans certains cas, l’intervention d’un conseiller médical en environnement intérieur (CMEI) est indiquée, dans le but d’identifier les diverses sources d’allergènes et de polluants. Ces conseillers interviennent sur prescription médicale, et sont recommandés notamment dans le cadre du parcours de soin de personnes souffrant de maladies respiratoires chroniques, comme les asthmes difficiles, la mucoviscidose, ou encore les pneumopathies d’hypersensibilité.
Ils peuvent, lors de leur intervention, réaliser les mesures de diverses agents biologiques dont les moisissures (aspergillus, alternaria…), les acariens, et les bactéries, dans le but de proposer et adapter les mesures d’évictions conseillées.
6. Conclusion
Il existe une grande diversité de sources allergéniques respiratoires, dont les liens ont été démontrés avec le risque de développement ou d’exacerbation d’un asthme. Certaines mesures d’éviction ont démontré leur efficacité dans la réduction de l’exposition allergénique. Dans certains cas, l’intervention d’un conseiller médical en environnement intérieur peut être nécessaire, afin d’établir un diagnostic plus approfondi, notamment chez les personnes souffrant de maladies respiratoires allergiques.
Dr Timé Muller – Mai 2022